Orchestre des Champs-Elysées

SCHUBERT MENDELSSOHN

F. MENDELSSOHN, CONCERTO POUR VIOLON EN MI MINEUR OP. 64
F. SCHUBERT, SYMPHONIE N°9 EN UT MAJEUR D. 944

FRANCESCA DEGO, VIOLON  (2, 3, 5 février)
VILDE FRANG, VIOLON (2, 3 mars)
PHILIPPE HERREWEGHE, DIRECTION

Schubert et Mendelssohn, tous deux en équilibre entre classicisme et romantisme, sont au cœur du répertoire de l’Orchestre des Champs-Élysées. Si chacun sait que la vie et la carrière du premier furent d’une exceptionnelle brièveté (1797-1828), on oublie parfois que son cadet (1809-1847) n’atteignit pas non plus la quarantaine. Il est en cela toujours déroutant de parler d’œuvres de la maturité au sujet des deux chefs d’œuvres présentés dans ce programme : la 9ème de Schubert écrite à 30 ans et le Concerto pour violon n°2 de Mendelssohn à 35 ans. Si l’assertion est juste au regard de la maîtrise de leur art, l’affirmation de la singularité de leur style et la constance de leur inspiration, les deux œuvres (chose surprenante chez l’auteur du Voyage d’Hiver), battent au rythme de deux jeunes cœurs et sont toutes deux irriguées d’une même irrésistible sève juvénile.

Achevée en février 1828, quelques mois avant sa mort, Schubert n’entendra jamais sa Neuvième Symphonie de son vivant. En ut M, il l’avait surnommé « Grande » en opposition à sa « petite » Sixième Symphonie en ut majeur. D’une durée de presqu’une heure, avec ses trois trombones, décourageant les musiciens Viennois qui renoncèrent à un premier projet de création à Vienne du vivant du compositeur, le surnom de « Grande » lui va comme un gant.

L’entrée majestueuse et lumineuse des deux cors donne le ton de l’œuvre, lequel ne sera plus démenti par le suite. Elle semble parcourue par un optimisme inaltérable. Fait suite au mouvement initial la cantilène douce et sereine de l’Andante, un Scherzo bouillonnant, et enfin un Allegro vivace qui conclut la symphonie dans une frénésie euphorisante.

La trame nerveuse de triolets qui sous-tend le premier thème du premier mouvement, la façon de développer le thème du Scherzo dans sa deuxième reprise ou encore les échapées féériques du développement du Finale sont autant d’inspirations très mendelssohniennes qui rendent d’autant moins surprenant que Schumann, découvrant l’œuvre après la mort de Schubert, demanda aussitôt à Mendelssohn de s’y pencher. Et c’est ce dernier qui en assura la création posthume à la tête du Gewandhaus de Leipzig le 21 mars 1839.

C’est cinq ans plus tard, en 1844, qu’il termine son Concerto pour violon n°2 en mi m qui sera sa dernière œuvre orchestrale. Si Beethoven avait ouvert la voie en 1806, LE concerto pour violon de Mendelssohn (tant il est le seul des deux à être passé à la postérité) a marqué indéniablement les exemples romantiques ultérieurs, celui de Brahms en tête. Pour concevoir la partie soliste, Mendelssohn entretient lors de la genèse de son concerto des liens étroits avec son ami le violoniste Ferdinand David, qui en assurera la création. Il en résulte une écriture instrumentale très idiomatique, qui permet de faire remarquablement sonner le violon et accentue l’atmosphère lumineuse et étincelante de l’œuvre. Car l’éventuelle noirceur de mi mineur succombe ici au lyrisme vif-argent du compositeur. Se dispensant du traditionnel tutti orchestral introductif, plaçant sa cadence avant la réexposition plutôt qu’à la fin du mouvement, enchaînant le deuxième mouvement avec le troisième, Mendelssohn s’affranchit des conventions pour mieux servir son lyrisme plein de brio, de clarté et d’une folle énergie. Transparent et plein de grâce comme un Mozart, brillant et virtuose comme un Paganini, le concerto de Mendelssohn est un des plus délicats du répertoire.

Il ne fallait pas moins de deux trentenaires (comme Mendelssohn composant son chef d’œuvre) pour relever le défi. Francesca Dego, à la fois partenaire fidèle des ensembles et artistes historiquement informés (tels que Roger Norrington et Christopher Hogwood) et lauréate de Concours Paganini de Gênes, passera le relais à l’étoile montante, déjà haut dans le firmament violonistique, Vilde Frang. Ce sont ces deux exceptionnelles jeunes artistes qui nous porteront dans la redécouverte de ce chef d’œuvre du répertoire.